15 000 aviculteurs en faillite

Selon le président du Conseil national interprofessionnel

de la filière avicole (Cnifa), 50% du nombre des aviculteurs recensés à l’échelle nationale ont cessé leurs activités à cause des effets de la pandémie de Covid-19. Par ailleurs, l’augmentation des prix du soja et du maïs, aliments essentiels pour les élevages, a dissuadé de nombreux producteurs de reprendre leur activité.

Outre la baisse de la production, la frénésie des prix du poulet s’explique par la réouverture des restaurants, la spéculation et la flambée des prix de l’aliment de volaille sur le marché international.

Les prix de la viande blanche ne cessent d’augmenter, suscitant l’incompréhension des consommateurs. Durement impactés par la baisse du pouvoir d’achat, certains pointent du doigt les spéculateurs qui tentent d’imposer leur diktat sur les prix en prévision du mois de Ramadhan. D’autres dénoncent la mauvaise organisation de la filière et souhaitent des mesures urgentes à même d’aider les producteurs à reprendre leur activité.

Très prisé par les couches moyennes, le poulet de chair était cédé hier entre 340 et 360 DA le kilo. Il y a quelques semaines, ce produit s’écoulait à 200 DA le kilo. Pour comprendre cette frénésie des prix, nous avons interrogé de nombreux aviculteurs et autres acteurs de la filière. «Beaucoup nous tiennent pour responsables de cette situation, alors que le meilleur d’entre nous gagne à peine une marge de 20 DA par kilo. Le poulet se vend actuellement à 260 DA en gros dans les poulaillers. Avant octobre dernier, on l’avait même acheté à 160 DA. Il ne faut pas oublier que les abattoirs aussi ont des marges allant de 20 à 40 DA», réagit un boucher à Boumerdès.

Pour Abdelkader, aviculteur de Lakhdaria, cette hausse des prix était prévisible, d’autant que des milliers d’aviculteurs ont cessé leur activité à cause des effets de la pandémie de Covid-19. Le nombre de ces derniers est évalué à 15 000 par le président de Conseil national interprofessionnel de la filière avicole (Cnifa), El Moumen Kali. Soit 50% du nombre d’aviculteurs recensés à l’échelle nationale, dit-il, soulignant que la fermeture des restaurants, des écoles et des universités après l’apparition de la Covid-19 a eu des répercussions fâcheuses sur la filière.

«Il n’y a rien d’anormal dans les prix actuels du poulet. C’est plutôt le retour à la normale après la réouverture des restaurants. Les prix doivent se stabiliser autour de 300 DA. L’année passée, il y a des professionnels qui ont vendu leur produit à perte. Aujourd’hui, l’augmentation des prix du soja et du maïs n’est pas un signe encourageant pour reprendre l’activité. En plus, la pandémie est toujours là. Tout le monde craint de revivre le scénario de l’année passée», a-t-il expliqué.Autant de facteurs qui prédisent des lendemains difficiles pour les petites bourses. «Chez nous, on ne parle que quand il y a augmentation des prix. Il fut un temps où on ne trouvait pas d’acheteurs», se défend Hamid, un aviculteur de Khemis El Khechna.

Les subventions profitent aux spéculateurs !

Notre interlocuteur n’a pas manqué de dénoncer l’anarchie qui caractérise la vente du poulet. «Ce sont les courtiers et les propriétaires des grands abattoirs qui dictent les prix. Les transactions se font par téléphone, pas au niveau des marchés de la volaille de Boudouaou, Aïn Bessam, Tablat, etc.», déplore-t-il. Madjid Yahia, aviculteur et président de la section du conseil interprofessionnel de la filière à Tizi Ouzou, se dit très inquiet de l’avenir de la filière, notamment après la hausse des prix de l’aliment de volaille à l’international.

«On travaille à perte. Le soja coûte actuellement 5700 DA le quintal, alors qu’il était à 2600 DA avant octobre dernier. Le maïs a atteint 11 500 DA/q après avoir été à 4800 DA/q il y a quelques mois», se plaint-il. Comme beaucoup d’aviculteurs, Madjid risque de mettre la clef sous le paillasson du jour au lendemain. «Même les producteurs d’œufs n’ont pas été épargnés. Après plusieurs rencontres à l’échelle nationale, nous avons décidé de suspendre l’approvisionnement des marchés durant trois jours. Nous n’avons aucune autre solution», a-t-il regretté.

Sabri Ahmed, membre de l’Office national interprofessionnel du lait (Onil) à Boumerdès, a dénoncé la spéculation sur le son, un produit subventionné très utilisé par les aviculteurs et les éleveurs de bovins laitiers. «Le ministère a fini par céder aux pressions des minoteries en augmentant le prix de cet aliment à 1800 DA/q, alors qu’il y a deux mois il était à 1500 DA. Le hic, c’est que ce produit est revendu au détail à 3500 DA/q. Les subventions de l’Etat profitent aux spéculateurs, pas aux éleveurs», s’indigne-t-il.

Contrairement aux craintes des consommateurs, le président du Cnifa s’attend à la stabilisation des prix durant le mois du carême, «pour peu que l’Etat vienne au secours des aviculteurs en difficultés et réduise les taxes imposées sur les produits avicoles». Pour sa part, le PDG d’ONAB, Mohamed Batraoui, a précisé la semaine dernière que l’Algérie se lancera dans la culture du maïs au niveau de plusieurs wilayas afin de réduire notre dépendance aux importations, précisant que pas moins de 8900 ha ont été dégagés à cet effet. 

Source : https://www.elwatan.com/a-la-une/15-000-aviculteurs-en-faillite-11-03-2021

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